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​75e anniversaire des Conventions de Genève: la communauté internationale doit se conformer à la lettre et à l’esprit du Droit 

ALGER- Alors que les violations des Conventions de Genève, traités fondateurs du droit international humanitaire (DIH), se multiplient dans les zones en proie à des conflits armés, des spécialistes du droit international soulignent leur « indispensabilité » pour la protection des populations vulnérables, relevant la nécessité pour la communauté internationale de préserver cet « acquis » et de réaffirmer son engagement à se conformer à la lettre et à l’esprit du droit.

« Le droit international est un droit de protection de la partie la plus faible, et c’est là où réside la force de ce droit. Quelles que soient les insuffisances, quelles que soient les violations constatées, il faut toujours se référer au droit international et le sauvegarder », a plaidé l’avocat au barreau de Paris et spécialiste du droit international, Me Majid Bouden, dans un entretien à l’APS.

Reconnaissant que ce droit est « loin d’être parfait », ce juriste a insisté sur l’importance de préserver cet « acquis de l’humanité ».

« Quelles que soient les critiques qu’on peut formuler à l’égard de ce droit, et elles sont fondées, il ne faut pas le jeter par-dessus bord parce que c’est la seule protection qui existe pour les populations qui ont besoin d’être protégées », a-t-il ajouté.

Selon Me Bouden, la protection du droit international lui même et de ses principes, notamment des Conventions de Genève en situation de conflit comme dans le cas de Ghaza, est une « nécessité ».

Abondant dans le même sens, Juan Soroeta Liceras, maître de conférences en droit international et relations internationales, juge également que les Conventions de Genève sont « indispensables ».

« Elles ne sont pas parfaites, mais elles sont ce qu’il y a de +moins pire+ dans la société internationale d’aujourd’hui. Elles sont indispensables, au moins en tant que référence de ce qui devrait être », a-t-il affirmé à l’APS.

Rappelant que ces Conventions adoptées le 12 août 1949, « constituent la base du droit international humanitaire », ce juriste soutient que « leur survie n’est pas menacée ».

Les deux spécialistes du droit international s’accordent, en outre, à dire que la violation du droit international est une « constante » de l’histoire des relations internationales et que si les Conventions de Genève sont bafouées ce n’est pas en raison d’insuffisances dans les règles juridiques, mais c’est plutôt « un acte délibéré » des parties au conflit.

Pour Juan Soroeta, ces violations se produisent parce qu’il y a « réticence des Etats à établir un tribunal qui pourrait avoir une compétence contraignante pour examiner ces violations et poursuivre les Etats qui les commettent ».

 

Violation du DIH: un acte « délibéré »          

 

L’avocat Majid Bouden fait remarquer, de son côté, qu’ « il y a toujours des insuffisances » et que « cela ne peut pas expliquer les violations ».   

« La violation est un acte délibéré de l’Etat », a-t-il souligné, estimant que le problème avec le droit international « réside dans son application ».

« Il n’y a pas de deux poids, deux mesures en droit international. Il y a tout simplement une application du droit international ou non. Et une non application est une violation du droit international lui même », a-t-il ajouté, avançant « deux raisons principales » pour expliquer la non application de ce droit.

La première, a-t-il poursuivi, c’est qu’ « il y a des parties qui n’ont pas la connaissance ou la volonté de s’adresser aux juridictions internationales pour faire appliquer le droit international. La deuxième, c’est qu’on constate, aujourd’hui, de façon malheureuse et inacceptable, la multiplication des interférences et l’exercice de pressions sur les juridictions internationales ».

Il en veut pour preuve les pressions exercées sur l’actuel procureur du Tribunal pénal international ou sur la précédente procureure de ce même Tribunal, soutenant que « ceci est en soi une violation du droit international ».

Ce spécialiste du droit international a appelé, dans ce contexte, à « rendre les juridictions internationales plus accessibles » et à « ne pas dépendre d’un formalisme juridique trop exigu ».

Il a qualifié, à ce titre, l’adhésion de la Palestine à la Cour pénale internationale en tant que membre d' »avancée majeure ».

Mais, pour Juan Soroeta, les mesures à prendre pour assurer le respect des principes énoncés dans les Conventions de Genève se résument « sans aucun doute, à l’établissement de la compétence obligatoire de la Cour internationale de justice pour examiner les violations graves du droit international, en particulier du droit humanitaire ».

« Malheureusement, les intérêts des grandes puissances rendent cette possibilité presque impossible », a-t-il estimé.

Dr Aymen Salama, également spécialiste en droit international, a déploré, de son côté, l’absence de mécanismes efficaces devant garantir l’application des Conventions de Genève et le manque de volonté chez les parties au conflit à les respecter, relevant, en outre, l’existence d’interférences politiques entravant l’application du DIH.

Pour faire face à ces défis, ce spécialiste plaide pour le renforcement des mécanismes de surveillance et d’enquête sur les violations graves des Conventions de Genève, mettant l’accent sur la nécessité de traduire devant la justice internationale, les responsables de ces violations, de renforcer la coopération internationale et d’encourager l’adhésion au Statut de Rome de la Cour pénale internationale qui compte actuellement 124 Etats parties.

Le président de l’Observatoire palestinien des droits de l’homme, Abdelatif Khodr, s’est interrogé, lui, sur la pertinence des règles internationales en l’absence de volonté de les appliquer, déplorant l’incapacité, depuis 10 mois, de la communauté internationale à obliger l’entité sioniste à arrêter l’agression génocidaire contre la bande de Ghaza et à se conformer au DIH.

 

 

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