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De Cherchell à la Silicon Valley, l’histoire de l’inventeur de la première plateforme arabe d’IA générative

ALGER-Mourad Bouache, l’un des innovateurs algériens les plus en vue dans le domaine des technologies de l’information, est reconnu pour avoir développé la première plateforme arabe d’intelligence artificielle (IA) générative, marquant ainsi une avancée significative dans le secteur technologique arabe. Il se distingue également par son engagement à transmettre aux étudiants algériens les dernières avancées en informatique et en entrepreneuriat technologique, en collaboration avec le chercheur algérien Belgacem Haba.

Le parcours de cet innovateur n’a pas été exempt de défis. Originaire de Cherchell (wilaya de Tipaza), il a su se frayer un chemin dans le monde de la technologie et de l’innovation, en poursuivant ses études à l’Institut national d’électronique et de génie électrique (Inelec) de Boumerdès, avant de mener des recherches dans les plus grandes universités américaines. Il a par la suite occupé plusieurs postes de haut niveau dans des entreprises technologiques de renom de la Silicon Valley, devenant ainsi une figure mondialement reconnue dans ce domaine.

Passionné par la poésie et la littérature arabes, il a nourri l’ambition de « laisser une empreinte dans la langue arabe », qu’il considère comme « une langue miraculeuse ». Avant de lancer la plateforme « Nojoom » d’IA générative, il a écrit deux ouvrages en arabe : « L’intelligence artificielle, l’électricité du futur » et « L’intelligence artificielle générative, la révolution des données ».

« Un simple événement de votre enfance, alors que vous êtes encore élève à l’école primaire, peut faire de vous une personne accomplie », confie le Dr Bouache, se rappelant le moment fondateur qui a éveillé son intérêt pour l’informatique. Dans les années 80, à l’âge de cinq ans, il a reçu un livre sur les ordinateurs en récompense de ses bons résultats scolaires. Après avoir lu ce livre « plus de cent fois », l’informatique devint pour lui une véritable « obsession », un sujet de discussion constant avec ses amis, marquant ainsi le début de son aventure.

Cette passion l’a conduit jusqu’à l’Université de Perpignan en France, où il obtint son doctorat, puis à l’Université d’Urbana-Champaign en Illinois, aux Etats-Unis, classée parmi les dix meilleures universités mondiales en informatique, où il enseigna dès 2012.

 

                         == »Le ciel est la seule limite »==

 

« Le ciel est la seule limite », déclare ainsi le chercheur pour décrire cette période décisive de sa vie, où il choisit d’élargir ses horizons et de demeurer aux Etats-Unis, afin d’approfondir ses connaissances et tenter de laisser une marque au niveau mondial, en profitant de l’environnement de travail « hautement stimulant » au sein de son université. L’Université d’Urbana-Champaign était en effet partenaire de la société « Intel », qui finançait ses recherches tout en en tirant profit sur le plan pratique.

Il rejoignit ensuite Yahoo en tant qu’ingénieur de la performance, où il dirigea en 2013 le premier département d’IA, exploitant les données de 800 millions d’utilisateurs actifs à des fins commerciales grâce à l’utilisation de la big data. Il fut le premier à développer un mécanisme d’IA assurant la liaison entre les processeurs (CPU) et les processeurs graphiques (GPU) chez Yahoo, une innovation clé pour l’avènement de l’apprentissage profond « deep learning » et de l’apprentissage automatique « machine learning ».

Par la suite, il travailla sur un projet de ville intelligente, apprenant beaucoup grâce à l’IA, à l’internet des objets et aux réseaux 5G, avant de rejoindre Intel en 2021, puis Meta (anciennement Facebook) en octobre 2024, pour collaborer sur un projet d’IA générative.

Ces diverses expériences ont permis au Dr Bouache de réussir à concevoir le premier modèle d’IA générative dans le monde arabe, conçu pour être « neutre et doté d’informations fiables ».

 

                        ==Nojoom, une étoile brillante dans l’IA arabe==

 

En 2023, le Dr Bouache, avec deux scientifiques algériens expatriés dans le domaine des sciences des données, lança « Najm.AI », une IA générative en

dialecte algérien, rapidement transformée en « Nojoom.AI », active en arabe classique. Cette plateforme fut mise en ligne pendant le mois de Ramadan 2024.

Expliquant le choix de ce moment précis, le chercheur souligne que « le mois de Ramadan revêt une symbolique particulière, tant en raison de son lien avec la langue et la culture arabes et islamiques qu’en raison de son association avec l’astronomie et les étoiles ».

« Lors de ma visite à la wilaya de Béni Abbès pour animer des conférences dans le cadre d’une caravane qui se rendait dans 24 wilayas, c’était durant le mois de Ramadan, là-bas, j’ai été émerveillé par la beauté unique des étoiles dans le ciel, ce qui m’a inspiré. C’est ainsi qu’est née l’idée du nom et du lancement en ce mois sacré », raconte-t-il.

« Nojoom » est une plateforme qui regroupe actuellement deux services : le premier, « Al-Thuraya », une IA dédiée à la conversation et à l’analyse d’images, et le second, « Suhail », un moteur de recherche académique permettant d’analyser des articles et des livres en les téléchargeant sous forme de documents.

La plateforme « Nojoom » repose sur le constat que les services d’IA existants dans le monde « sont biaisés et fournissent des informations erronées concernant le monde arabe », selon le Dr Bouache, car ils se basent uniquement sur des sources occidentales pour fournir des réponses traduites en arabe. A l’inverse, « Nojoom » puise dans des sources arabes « de qualité », soigneusement sélectionnées par l’équipe algérienne de la plateforme. Les informations sont ensuite organisées, triées et validées par des algorithmes d’IA avant d’être minutieusement vérifiées et corrigées.

Il considère que le contenu de qualité en arabe est « relativement accessible sur Internet », mais qu’il demeure « insuffisamment diversifié », avec 75 % de ce contenu provenant d’un ou deux pays seulement. Il incite ainsi les utilisateurs arabes, plus de 450 millions au total, à intensifier la production de contenu en ligne, car cela représente « le seul moyen de préserver la culture arabe et de fournir un contenu à la fois diversifié et de qualité », contribuant ainsi à l’amélioration des services d’IA générative en arabe.

Le Dr Bouache ambitionne de faire de Nojoom « un point lumineux pour l’Algérie dans le ciel de l’IA générative mondiale, et un espace de créativité arabe ». Il prévoit également de lancer de nouveaux services sur cette plateforme, spécialisés dans des domaines tels que l’économie, la édecine ou la recherche scientifique, chacun portant le nom d’une étoile.

   

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